29 Juillet 2012
En effet, je dois confesser mes péchés, mes péchés sociaux, commis vis-à-vis de la société de mes concitoyens J’ose en parler sur ce blog. Et j’imagine déjà les accusations d’orgueil d’intellectuel élitiste, de mépris du peuple et de ses loisirs, de manque à l’élémentaire solidarité nationale, voire patriotique !
Quels péchés ?
Le sport radiodiffusé, télévisé, raconté dans les journaux m’ennuie, ne m’intéresse nullement. Dès qu’aux infos de France-Culture ou France-Inter voire même, rarement, de la télé, on passe aux pages « sportives » aussitôt j’éteins et coupe la parole aux chroniqueurs. Et je ne lis pas les pages des journaux consacrées aux sports
Il m’est difficile de m’intéresser si peu que ce soit aux championnats divers qui passionnent les gens, qu’il s’agisse de football, rugby ou cyclisme. Les déchaînements de paroles nationalistes ou guerrières, les enthousiasmes, les débordements de joie ou de colère, les manifestations plus ou moins violentes ou agressives des « supporters », le culte de champions, la fierté nationale exprimée en cas de victoire d’une équipe de France, ne me concernent pas. J’ai même tendance à trouver qu’il y a dans tout ça, souvent, beaucoup de bêtise, de vulgarité, de nationalisme, le tout porté par un « business » qui me paraît être le vrai carburant de tous ces spectacles « sportifs », occasions de profit énormes de tous ceux qui l’organisent et le développent. Le « sport » n’étant ici qu’un prétexte.
Et le déploiement de forces policières lors de certains matches me navre, me met en colère : je suis mécontent que le business lucratif des uns et la bêtise de milliers d’autres entraînent ces dépenses publiques énormes que représente la « sécurisation » des stades et de leurs abords ! Et que des « loisirs » des « jeux d’équipe », soient devenus occasion de violence, agressivité, comportements intolérants et barbares et demandent la mobilisation des forces de l’ordre.
Je pousse cette « marginalité », ce « péché social », que j’avoue ici, jusqu’à n’éprouver aucun, vraiment aucun intérêt pour les divers spectacles des Jeux Olympiques. Il ne me viendrait même pas à l’idée d’allumer ma télé pour regarder une épreuve ou une cérémonie de ces Jeux. Mon « péché » est encore pire que ce que vous croyez : que ces Jeux se déroulent à Londres et non à Paris me laisse froid. Et la victoire ou la défaite des sportifs français ne me semble pas mériter les démonstrations de joie ou de peine dont elles sont l’occasion. De toute façon c’est joué d’avance : à part quelques exceptions, ce sont toujours les athlètes des pays les plus riches et les plus puissants qui gagnent le plus de médailles qu’elles soient d’or, d’argent ou de bronze.
Je suis Marseillais, d’une ville où l’amour pour l’O.M. est fort répandu. J’habite Saint Étienne où plus encore qu’à Marseille, toute une ville semble communier dans l’attachement à l’équipe locale de foot, aux « Verts ». J’aime beaucoup le Brésil que je désigne parfois, en boutade, comme mon second pays : et là-bas, toute la population de toutes les classes sociales, de tous les milieux, se rassemble pour célébrer les footballeurs de la « Seleção brasileira » de l’équipe nationale ! Et les Brésiliens ont transformé un simple coureur automobile – Ayrton Sena- en héros national !
Me voici alors enfermé dans mes contradictions et rempli de confusion.
Il m’est souvent arrivé de me dire que je n’aurais jamais pu réussir la moindre carrière politique faute d’être capable de passer les heures nécessaires à assister, encourager, féliciter, consoler les équipes sportives de la circonscription que j’aurais prétendu représenter !
A ces péchés graves contre la majorité de mes concitoyens, j’ajoute, en plus, un désintérêt total pour la plupart des émissions télévisées. Émissions, acteurs, journalistes, séries diverses, je les ignore quasiment tous et ne saurais mettre un nom ou un visage sur ces « vedettes » quelles qu’elles soient. Et je m’ébahis lorsqu’autour de moi on me parle de la tête de l’un ou de l’allure de l’autre alors que le plus souvent je ne sais même pas de qui il s’a git.
En fait ce n’est pas tout à fait exact. En effet j’ai remarqué une tendance répandue dans les medias, y compris au journal « Le Monde » qui n’y échappe pas du tout : les medias consacrent de plus en plus de temps et de pages à parler…des medias ! Le journal Le Monde publie des pages entières consacrées à des…journalistes ! Alors le lecteur finit par en connaître quelques-uns même s’il ne regarde jamais leurs prestations télévisées !
Condamné alors à la marginalité ? A subir l’opprobre des uns et des autres ? A être montré du doigt comme mauvais citoyen et rabat-joie ? Faudra-t-il que je me décide à allumer la télé et regarder courir ou nager ou sauter ou lutter tel ou tel champion national ?
Suis-je dans l’erreur si je pense que traiter au même niveau d’importance les informations sur la guerre que mène El Assad contre son peuple en Syrie et un match de foot me paraît une insulte à la dignité de ceux qui meurent pour leur liberté ?
Les médailles d’or, d’argent ou de bronze, sont-elles plus importantes que la dramatique sécheresse qui sévit aux États-Unis, ruine les récoltes de céréales et provoque une flambée de prix qui annonce des famines pour bientôt chez les damnés de la terre ? Sont-elles plus importantes que les préparatifs de guerre et la déstabilisation du Sahel en Afrique, conséquences directes de notre intervention « humanitaire » en Libye ? Sont-elles plus importantes que la nouvelle guerre qui une fois de plus ruine le Congo ?
Rassurez-moi et dites-moi si vous participez vous aussi à ma condamnation ou si, pour garder le discours religieux du début, vous me donnez ou non l’absolution !
Henricles. 29 juillet 2012