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Le blog politique et culturel de henricles

C'est le blog de quelqu'un qui n'appartient à aucun parti politique mais qui pense que le simple citoyen peut s'emparer des questions politiques économiques et de société pour proposer ses réflexions etdonner son avis C'est également un blog littéraire et culturel où je place divers récits et oeuvres qui me concernent et ont un intérêt. notamment des récits de voyage et des tableaux d'amies peintres

Instrumentalisation politique del'Islam

Article extrait de « The conversation » du 16 XII 2021

Par Steven Duarte. Maître de conférences en Islamologie. Université Paris-Nord Sorbonne (extraitdel'article)

Vous lirez ci-dessous un article fort intéressant qui a le mérite de rétablir des vérités et dénoncer des erreurs dangereuses à propos de l’Islam.

Cet article serait encore plus convaincant si l’auteur avait tout de même rappelé que dans les banlieues de nos grandes ou moyennes villes et en général dans les milieux musulmans, il y a des militants islamistes, téléguidés et endoctrinés par des Islamistes salafistes ou frères musulmans du Moyen-Orient, qui agissent activement....Or, il ne faudrait pas que sous l’influence de ces militants, les Musulmans de France se replient sur des traditions qui impliquent, hélas, par exemple, la condamnation violente des homosexuels et rejettent l’égalité hommes-femmes et les libertés sexuelles.

Henricles

 

 

 

L’instrumentalisation de l’islam à des fins politiciennes atteint des sommets aujourd’hui au sein des médias mainstream. Depuis longtemps déjà, des chercheurs ont analysé cette fascination comme étant pathogène, et ce, bien avant les attentats djihādistes sur notre sol.

N’ayons pas peur des mots, il s’agit maintenant d’une véritable obsession qui transcende les courants politiques. Comme le soulignait récemment un chroniqueur humoristique, certains « parlent plus d’islam qu’un imam ». Désormais, nul besoin d’être spécialiste du fait religieux, tout le monde se croit autorisé à en disserter doctement, monsieur Jourdain est devenu docteur en islamologie.

Dans cette cacophonie, les spécialistes de l’étude scientifique de l’islam (ou « islamologues ») sont pris de court face à tant de fake news touchant leur domaine de compétences. Ils ont déjà été écartés des débats publics de par le délabrement progressif des études classiques arabes portées notamment par quelques départements universitaires. Certains se sont aussi autocensurés, suivant en cela une ligne radicalement anti-médias inspirée par le sociologue Pierre Bourdieu en se réfugiant dans le strict champ de leur spécialisation.

Des politologues spécialistes des mouvements fondamentalistes de l’islam ont certes investi la parole publique en livrant leurs analyses contradictoires mais eux-mêmes sont désormais largement dépassés par des éditorialistes et chroniqueurs « toutologues », peu aptes à respecter le laborieux travail des universitaires. Comme le rappelle fort justement Étienne Klein : « pour se rendre compte qu’on est incompétent, il faut être compétent »

Une nouvelle doxa médiatique ultra réactionnaire semble désormais se dessiner sous nos yeux, avec ses ayatollahs et ses nécessaires boucs émissaires. Pour pasticher Gilles Kepel, cette « haine d’atmosphère » nous place de facto, nous, chercheurs du temps long, dans une forme de dissidence. Pourquoi ? Non pas car nous serions des militants, ou que notre rôle serait de défendre une communauté en particulier, mais parce que la recherche scientifique vise justement à lutter contre le simplisme et les visions binaires partisanes.

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La thèse du clash/choc des civilisations

À ce titre, exerçons ce regard critique en « tordant le cou » pour le moment à deux fausses évidences fort répandues désormais : la thèse du « choc/clash des civilisations » et l’équation dangereuse islam = « islamisme ». Il y en a d’autres mais l’espace qui est le nôtre ne nous permet pas d’en traiter davantage et ces deux idées reçues structurent le discours complotiste autour de l’islam de manière centrale.

Le professeur de sciences politiques états-unien Samuel Huntington a effectivement popularisé la thèse du choc des civilisations dans un article devenu ensuite son célèbre ouvrage mais il n’est pas le père de cette notion. Il l’a empruntée à un collègue islamologue célèbre, Bernard Lewis.

Les partisans de cette théorie ignorent qu’ils partagent en cela la vision du monde binaire des théoriciens du djihād offensif qui y croient eux aussi fermement et poussent des individus perméables aux rhétoriques belliqueuses à prendre part à cette soi-disant guerre civilisationnelle. Bien entendu, les termes utilisés pour la présenter ne sont pas identiques, les djihādistes manipulent des notions de l’islam classique telles que dār al-ḥarb (territoires de la guerre) face à un dār al-islām (territoires de l’islam) assiégé, toutefois, le résultat est identique, c’est toujours la guerre du bien (fantasmé) contre le mal (fanstasmé).

Huntington considérait dans son ouvrage que la religion était la matrice de neuf « civilisations » qu’il croyait déceler mais il se trouve que même à une époque où les religions structuraient bien plus qu’aujourd’hui la vie des populations, à l’apogée par exemple des trois puissants empires islamiques (ottoman, perse et moghol), la France de François 1er était déjà l’alliée de l’Empire ottoman sunnite contre les Habsbourg pourtant chrétiens. Et quant aux Portugais, chrétiens eux aussi, ils étaient alliés avec l’Empire perse chiite (contre les Ottomans)

Les intérêts stratégiques furent bien plus à l’origine des alliances entre les empires que la propagande religieuse. Le célèbre réalisateur Ridley Scott a fait de ce constat basique un beau et divertissant film sur les croisades Kingdom of Heaven, on peut utilement bien sûr, et de manière plus scientifique, consulter sur ces questions des ouvrages savants.

 

En réalité, il n’existe pas de choc des civilisations car il n’existe aujourd’hui plus qu’une seule civilisation capitalistique néo-libérale qui règne sans partage et au sein de laquelle musulmans, juifs ou encore Chinois confucéens participent pleinement. Et au sein de cette civilisation, les fondamentalismes religieux sont paradoxalement très à l’aise avec l’idée de marché transnational dérégulé.

Que dire alors de notre temps, depuis que la sécularisation s’est répandue au XXe siècle en Europe mais aussi dans le monde, et ce, jusqu’au plus intime, la maîtrise de la fécondité ? Où classer d’après les catégories huntingtoniennes, l’Arabie saoudite, pays d’obédience salafiste, qui reste l’allié le plus fidèle des USA pourtant protestants, après avoir été l’allié des Britanniques jusqu’au milieu du XXe siècle ?

Ces catégories de « civilisations » sont une supercherie qui masque la complexité du monde, elles confondent les religions historiques avec les fondamentalismes religieux qui en sont issus. Ne perdez pas votre temps avec Huntington, lisez plutôt « Le dérèglement du monde », cet essai utile et toujours aussi actuel d’Amin Maalouf.

L’inquiétante équation : islam = « islamisme »

Pour ce qui concerne maintenant l’équation islam = « islamisme », les spécialistes des mouvements politico-religieux de l’islam reprennent souvent ce terme placé ici entre guillemets, ils parlent également de « courants fondamentalistes » ou d’« islam politique ». Ce faisant, ils désignent par là des mouvements précis par exemple, le salafisme saoudien, les Frères musulmans ou encore le mouvement missionnaire du tablīġ.

À ma connaissance toutefois, aucun spécialiste digne de ce nom n’aurait l’imprudence de réduire l’islam (religion) et l’Islam (civilisation) à ces courants fondamentalistes. Ce serait aussi incongru que d’affirmer que l’on pourrait réduire le judaïsme et sa grande histoire à n’importe quel mouvement messianique israélien contemporain.

Par ailleurs, il ne faut pas confondre ces mouvements fondamentalistes avec les organisations qui appellent à la violence et au crime de masse, ce que l’on a désormais coutume de qualifier de djihādistes ou de terroristes car, malgré quelques points communs d’ordre théologique, ce sont des réalités bien distinctes...........Affirmer que l’islam ne pourrait être que fondamentaliste c’est donner raison à l’extrême droite religieuse du monde musulman tels que les idéologues de Daech qui prétendent à cette hégémonie, c’est valider leur vision du monde.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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