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Le blog politique et culturel de henricles

C'est le blog de quelqu'un qui n'appartient à aucun parti politique mais qui pense que le simple citoyen peut s'emparer des questions politiques économiques et de société pour proposer ses réflexions etdonner son avis C'est également un blog littéraire et culturel où je place divers récits et oeuvres qui me concernent et ont un intérêt. notamment des récits de voyage et des tableaux d'amies peintres

Une lecture enrichissante

Luigino Bruni La blessure de la rencontre.

L’économie au risque de la relation. 235 pages

Édition Nouvelle Cité. Juillet 2014

Voici un livre déconcertant pour qui a été formé à l’école de l’Université française, laïque, peu encline à chercher des références intellectuelles chez Thomas d’Aquin ou danslesencycliques du Vatican.

Il faudrait pourtant que nombreux soient ceux qui fassent l’effort de le lire. « L’effort » ? Oui. Il remet en cause les fondements anthropologiques et philosophiques de l’économie politique telle qu’elle a été fondée depuis Adam Smith, c’est dire qu’ici le discours est parfois philosophique et cite souvent Aristote, Hobbes ou Hegel. Mais rassurez-vous, l’auteur est clair et ne nous délivre pas un discours abstrait. Il émaille d’ailleurs son livre de nombreux exemples concrets

Théoriquement le marché vu par les économistes, met en présence, des individus qui ne s’engagent pas comme personnes dans une transaction. Le boulanger livre son pain contre une certaine somme d’argent quelle que soit la personne du client. L’assureur ne cherche pas à « rencontrer » l’assuré, ni l’assuré, l’assureur. Ils échangent un contrat par lequel l’un a, en principe, la protection qu’il a demandée et l’autre, la rémunération qui y correspond.

Luigino Bruni affirme et montre que cette absence théorique de relation personnelle dans l’économie de marché ampute gravement la vie économique et sociale et finalement forme obstacle au bonheur.

Comme l’écrit P.Y. Gomez dans la préface du livre : « pour Bruni l’économie de marché peut être un milieu propice au développement des vertus civiles…Une juste considération de la personne humaine doit tenir compte du rôle que jouent la gratuité, le don et la réciprocité dans les relations interindividuelles…Si la liberté grandit avec le don, c’est une économie de l’échange qui se dessine… »

Le marché d’Adam Smith, c’est la rencontre de deux désirs, deux « Éros ». Bruni nous invite à penser et pratiquer une économie qui implique l’amitié, la « filia » et, au-delà, l’amour, « l’agapè » ! Donc une économie où, au-delà du « marché », soit au centre, la rencontre des personnes. Rencontre qui peut entraîner certes des blessures – si l’autre déçoit ma proposition de rencontre – mais amène aussi le bonheur, la « bénédiction »

Et Bruni fait référence à la tradition de pensée économique italienne sur l’économie civile, de gens comme son compatriote du XVIII° siècle, Antonio Genovesi (1712 / 1769). Il rappelle aussi l’importance de John Stuart Mill trop souvent négligé.

L’auteur de ce blog a trouvé dans cet ouvrage la réflexion théorique qui l’a rassuré sur le sérieux de quelques-unes de ses intuitions. Ainsi son idée que la réduction de la durée du travail ne devrait pas être le but des revendications mais qu’au contraire l’objectif à atteindre devrait être la « désaliénation » du travail, c’est-à-dire la transformation des postes et conditions de travail de telle sorte que le travailleur s’y épanouisse, se réalise librement. La réduction du temps passé au travail rémunérateur ne devrait provenir que du choix d’une économie de la frugalité, mais non de la nécessité de se libérer d’un travail aliénant !

Ainsi cette autre idée que dans une société de services ( 80 % des personnes actives travaillent dans le secteur tertiaire), nous nous rendons des services mutuels et que nous devons donc envisager notre travail en fonction des besoins de nos concitoyens auxquels nous rendons des services et non pas d’abord en fonction de nos besoins de travailleurs.

Bref, ne pas se résigner à vivre dans une société dominée par une économie où chacun ne cherche que son intérêt individuel, qu’à « maximiser ses profits », mais au contraire transformer la vie économique à la lumière des vertus de la société civile et notamment le don, la gratuité, la rencontre entre des personnes.

Au risque de provoquer le rire et la moquerie des « esprits forts » !

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