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Le blog politique et culturel de henricles

C'est le blog de quelqu'un qui n'appartient à aucun parti politique mais qui pense que le simple citoyen peut s'emparer des questions politiques économiques et de société pour proposer ses réflexions etdonner son avis C'est également un blog littéraire et culturel où je place divers récits et oeuvres qui me concernent et ont un intérêt. notamment des récits de voyage et des tableaux d'amies peintres

Mai 68 en France

 

Initiative intéressante à Yssingeaux : l’association « Cinéma…m’était conté » organise une semaine consacrée à Mai 68 à l’occasion du cinquantenaire de ces événements. Projections de films, débat et une courte conférence un soir que l’auteur de ce blog a été invité à prononcer devant le public avant la projection du film : « Après-mai » d’O. Assayas

Vous trouvez ci-dessous la troisième partie de cet exposé.

 

Le Mai français

En 1959, A. Sauvy publie un livre qui s’intitule «  La montée des jeunes ».

Il y écrit notamment ceci : «  Si…la France ne réussit pas à accueillir ses jeunes, si ceux-ci trouvent les portes fermées, si les emplois sont rares dans une économie improductive…cette éventualité s’accompagnerait de troubles politiques…

Et plus loin il écrit : « les jeunes finiront bien par…réclamer leurs droits. Mais ce serait alors une ère de turbulence et de désordres accompagnée de troubles politiques. …Si nous restions dans nos vieilles méthodes, dans nos vielles idées, dans nos vieilles maisons, les jeunes feraient éclater tout le système… »

C’était en 1959 ! 9 ans après !

Alfred Sauvy fut un des très rares observateurs de la société française à avoir prévu que l’afflux des jeunes du baby-boom, auquel le pays ne s’était pas préparé, provoquerait un jour des troubles divers. Les questions  démographiques ne sont pas suffisamment prises en compte mais elles sont pourtant souvent un facteur décisif des problèmes que rencontrent les sociétés. C’est le cas actuellement lorsqu’on traite de la question des migrations en provenance d’Afrique : on néglige le fossé de plus en plus béant qui se creuse entre la démographie africaine et celle de l’Europe ! Bref…

 

  1. Situation politique et économique

De Gaulle depuis 1958

Plus de guerres coloniales.

Politique de grande puissance. Mais cela coûte cher.

De Gaulle réélu en 1965 pour 7 ans mais a été mis en ballotage et au second tour était opposé à Mitterrand

Gauche unie (PCF +SFIO + la FGDS de Mitterrand) ont perdu les élections législatives mais de peu et  les gaullistes gardent la majorité mais elle est faible

Le PCF à cette époque obtient plus de 20%  (2017 :  2,70%) des suffrages et la SFIO (devenue le PS en 1971) autour de 20 % aussi (2017 :  PS 7,44 %). A l’extrême-droite il n’existe que des groupuscules. Le F.N. n’est fondé qu’en 1972 et n’aura de succès électoraux qu’à partir des années 80 / 90

Décisions contestées des gouvernements gaullistes. Pouvoir personnel + ordonnances de 1967 sécurité sociales contestée + Pouvoir d’achat.

 

CGT, F.O. et CFDT sont fortement dans l’opposition. Il y a une aspiration au changement. Les classes populaires aspirent à entrer pleinement  dans la société dite «  de consommation » alors que depuis 1960 il y a eu un enrichissement économique considérable qui, selon eux, ne profite pas suffisamment au monde des ouvriers et employés. Il y a aussi une aspiration forte à plus de congés et moins d’heures de travail (durée hebdomadaire moyenne du travail salarié : 44 h ! 40 + 4). La majorité  des salariés n’ont encore que 3 semaines de congés payés malgré un accord en 1965 sur la quatrième semaine.

En 1968 ceux qui n’ont pas les grands équipements électro-ménagers et l’automobile aspirent à les obtenir : 70 % ont un frigo 62% la télé, 50% aspirateur et machine à laver le linge, 53% une automobile mais seulement 27% des ménages ont les quatre appareils électroménagers.

On l’a déjà dit plus haut, on n’a pas construit en nombre suffisant, logements  écoles, collèges, lycées et universités pour accueillir les générations nombreuses du baby-boom !

 

  1. De la révolte des étudiants à la grève générale.

Janvier, février, mars, avril, incidents presque permanents à Nanterre provoqués par des militants anarchistes, trotskistes ou maoïstes dont la figure la plus emblématique est Daniel Cohn Bendit,  « Dany Le Rouge » !

Prétextes : manifestations  contre guerre au Vietnam et volonté de ne plus accepter la séparation des filles et garçons dans la cité universitaire !

22 mars création du mouvement du même nom : 142 étudiants occupent le bâtiment administratif de Nanterre !

Du 2 au 10 mai le mouvement des étudiants, bientôt suivis par les lycéens se généralise à toutes les universités et à la province. Début mai la Sorbonne que des étudiants occupaient depuis la fermeture de la fac de Nanterre, est évacuée par la police : c’est la première fois que la police pénètre à la Sorbonne depuis l’occupation par le régime de Vichy ! Cela déclenche l’indignation et des émeutes violentes. Des manifestations puissantes violemment réprimées par la police le 3 mai puis surtout la nuit des barricades le 10 mai créent un véritable climat insurrectionnel. La répression policière provoque des réactions de solidarité partout et le mouvement ne fait que s’accentuer.

Mais le 3 mai, dans l’Humanité, Georges Marchais, patron du PCF, condamne durement l’agitation étudiante menée selon lui par des gauchistes tels que Daniel Cohn Bendit cet « anarchiste allemand » écrit-il ! 

 Peu-à-peu le mouvement s’étend au monde ouvrier et aux salariés d’autant plus que les militants d’extrême-gauche souhaitent la réunion des luttes ouvrières à la lutte des étudiants.

Une gigantesque manifestation le 13 mai et ensuite grève générale dans toute la France. D’abord des ouvriers (14 mai les ouvriers de Sud-aviation occupent leur usine) puis ensuite tous les salariés.


 

 

Mais il ne s’agit pas seulement de grève.

  1. Il y a partout occupation des lieux de travail par les salariés qui manifestent ainsi que les travailleurs ont vocation à devenir les maîtres de leur travail.
  2. Contestation des relations hiérarchiques : profs, contremaîtres, patrons, chefs grands ou petits, toute hiérarchie est rejetée
  3. Prise de parole généralisée : on veut donner son avis sur l’organisation de l’institution où on travaille.
  4. Refus des horaires imposés et revendications de plus de temps de liberté «  on ne veut plus perdre sa vie à la gagner »
  5. Aspiration à liberté de mœurs et rejet de la morale traditionnelle.

Bien de ces revendications sont aussi importantes pour les ouvriers et employés que pour les étudiants et lycéens

Entre le 3 mai et le 20 mai particulièrement les 16 et 17 mai se sont environ 8 à 10 millions de salariés qui se sont, de fait, mis en grève et beaucoup occupent leurs lieux de travail.

  1. De l’insurrection parisienne à la paralysie du pouvoir.

Il y eut, surtout à Paris, de vrais mouvements insurrectionnels : une nuit d’émeutes le 10 mai où le quartier latin se couvre de barricades que les forces de l’ordre ne réussiront à abattre qu’en tout début de  matinée. Nuit de violence 367 blessés graves dont 251 policiers. 468 arrestations.  

Les pouvoirs publics ne savent que faire.

Le 24 mai De Gaulle dans une allocution solennelle annonce qu’il va interroger le peuple par referendum sur…La participation. Il montre ainsi qu’il n’a pas compris l’essence du mouvement.

Cette allocution se passe alors qu’il y a des émeutes au quartier latin qui vont durer toute la nuit. Cette fois il y a aussi beaucoup d’ouvriers et d’employés qui se sont mêlés aux étudiants. C’est à nouveau insurrectionnel. Presque 800 arrestations et 456 personnes soignées dans les hôpitaux !

Des Comités de défense de la république, CDR (gaullistes se créent pour lutter contre ce que De Gaulle a appelé « la chienlit » ! Et La droite et les gaullistes, secrètement, vont s’organiser et se mobiliser on s’en apercevra bientôt !

27 mai Pompidou invite les grandes centrales syndicales à venir négocier les conditions d’une sortie de crise. Rue de Grenelle. 25 h de négociation très tendues ! Les leaders syndicaux obtiennent une très grande avancée :

SMIC plus 30 %.

Salaires augmentés progressivement de 10%. Reconnaissance promise de la section syndicale d’entreprise. Promesse d’abaissement de l’âge de la retraite et de diminution de la durée du travail !

Jamais il n’y avait eu tant de choses obtenues d’un seul coup !

Or, consultés, de nombreux ouvriers refusent de reprendre le travail et en veulent plus !

A partir de ce jour le pouvoir est paralysé. Les commandes de l’État ne répondent plus !

Mitterrand, devant la vacance apparente ou réelle du pouvoir annonce sa candidature à l’Élysée et qu’il formerait un gouvernement de gauche ! Pour la droite et les Gaullistes cette déclaration de Mitterrand est scandaleuse puisque De Gaulle est président élu jusqu’en…1972

Entre le 24 et le 30 mai : apparente vacance du pouvoir !

Les 28 et 29 mai, De Gaulle a annulé le conseil des ministres et a disparu !

La situation est terrible et toutes les rumeurs même les plus folles se répandent ! (suicide ; démission ; retour avec l’armée pour rétablir l’ordre …).

Coup de théâtre !

Le 30 mai immense manifestation de centaines de milliers de partisans de De Gaulle et de la droite contre les fauteurs de trouble ! Au lieu des drapeaux noirs des anarchises ou des drapeaux rouges des divers groupes communistes arborés au quartier latin, c’est une marée humaine qui déploie des drapeaux tricolores aux Champs Élysées !

Le 30 mai dans une courte allocution  De Gaulle annonce qu’il dissout l’Assemblée nationale et qu’il y aura des élections législatives dans les délais prévus par la constitution !

Les 28 et 29 mai De Gaulle, découragé, était allé retrouver son camarade le Général Massu commandant de forces françaises en Allemagne qui lui avait conseillé de ne pas démissionner et de reprendre la main !

 

  1. Le reflux et la défaite des révolutionnaires.

Les extrémistes de gauche déclarent tout de suite « élections piège à con » et veulent croire à la prolongation du mouvement. Et, de fait, il a fallu plus d’un mois pour que la reprise du travail ait lieu partout et que les institutions diverses se remettent à fonctionner. Il y eut encore des violences : ainsi le 10 juin il y eut de violents accrochages à l’usine Renault de Flins et un jeune, Gilles Paupin, en fuite, se noya. On peut ainsi parler du mouvement de « mai-juin68 ».

Mais l’essence revenue dans les stations-services, l’été, le beau temps, les vacances et l’exode vers les plages aidèrent beaucoup au retour de l’ordre.

De plus, les partis politiques voulaient se consacrer à la campagne électorale : l’heure n’était plus ni pour les partis de gauche ni pour les centrales syndicales, de former obstacle aux élections

Et puis à la stupeur de beaucoup, les élections législatives de juin 1968 apportèrent à l’Assemblée nationale une forte majorité de Droite et  de Gaullistes !

358 majoritaires pour De Gaulle + 21 de Droite. La gauche de Mitterrand perd 61 sièges et le PCF en perd 39. Aucun élu d’extrême-gauche.

C’est clair, le pays qui a voté a voté contre ce que la droite a appelé « les désordres de Mai » !

Un mouvement de gauchistes a publié un slogan : « vous avez voté, maintenant vivotez » Et pour les révolutionnaires  mai 68 «  ce n’est qu’un début continuons le combat ! »

 

 

 

 

 

Conclusion

Mai 68 a été un événement considérable. Impossible en quelques lignes d’être exhaustif.

Pour la droite mais plus généralement pour une grande partie de l’opinion plutôt conservatrice, ce furent les « désordres de mai ». Le début de la              fin de l’autorité légitime dans les institutions et l’enseignement. La perte de valeurs morales, socles de la solidité de notre société. Les hommes politiques de droite tels que Sarkozy, ont violemment fustigé Mai 68 et son idéologie cause, selon eux de l’affaiblissement du pays.

Pour beaucoup de militants révolutionnaires, Mai 68 a été une occasion manquée d’abattre le système capitaliste et ils pensaient qu’il fallait continuer le combat. Et ils ont essayé quitte à tomber dans des dérives terroristes comme les « Brigades rouges » en Italie, la « Fraction armée rouge » en Allemagne, « Action directe » en France !

Un très grand nombre de citoyens, tout en déplorant les violences commises et les destructions diverses  ont pensé que le mouvement de mai avait joué un rôle important dans la transformation des rapports sociaux : libération de la parole, plus de respect des aspirations de la jeunesse, morale moins rigide. Les combats  féministes qui suivirent ont pris leur source dans ce mouvement de mai. Et c’est aussi de « Mai » que datent les remises en cause du mode de développement industriel qui menace l’environnement, épuise les ressources naturelles et ne propose  qu’une vision matérialiste à des citoyens, particulièrement les jeunes, qui aspirent à autre chose.

Chacune et chacun apprécie les conséquences de Mais 68 en fonction de ses propres opinions politiques, idéologiques ou religieuses.

Henricles. Silhac. Mars 2018

 

 

 

 

 

 

 

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D
Wallah suprimme sinon jvai te bz sale fils de pute
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M
Fait revivre une page de nôtre histoire. Remémore des faits parfois oubliés.<br /> Excellent article sur les événements mondiaux de 68. <br /> Félicitations Professeur Henricles
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H
Merci cher Maurice ! Bises à toi et Yvonne !