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Le blog politique et culturel de henricles

C'est le blog de quelqu'un qui n'appartient à aucun parti politique mais qui pense que le simple citoyen peut s'emparer des questions politiques économiques et de société pour proposer ses réflexions etdonner son avis C'est également un blog littéraire et culturel où je place divers récits et oeuvres qui me concernent et ont un intérêt. notamment des récits de voyage et des tableaux d'amies peintres

Jounal intermittent. Buenos Aires. 2009 I Seul à Buenos Aires.

I Seul à Buenos Aires.

 

Oui, à plus de 11000 kilomètres de chez moi, seul, complètement seul dans cette mégalopole de 10 millions d’habitants qui n’en finit plus de s’étendre vers ce que nous Français appelons la pampa. Les Argentins la nomment tout simplement la « llanura », la plaine, puisque « Pampa » est le nom d’une province, au Sud-ouest de celle de Buenos Aires.

Quel enchaînement d’événements ont conduit ce prof. d’histoire, retraité, à se trouver ici, dans cette capitale où il ne connaît personne et où personne ne le connaît, dont il n’a jamais appris la langue espagnole qu’il baragouine avec peine et ne comprend que très difficilement ?

Deux fils en France, une fille au Brésil et leur mère, en ballade à plus de 1500 kilomètres d’ici à la frontière des trois pays, Paraguay, Argentine et Brésil ! Et  ce matin, il demandait dans un magasin de Suipacha, une rue près de chez lui, où il pourrait trouver une « alcachofa », un pommeau de douche pour remplacer l’objet défaillant de la salle d’eau de l’appartement de l’avenue du 9 juillet !

Et il pense à un autre, lui aussi seul, perdu au milieu de la jungle urbaine. Il a 20 ans, est sans famille. Sa grand-mère, le seul être qui lui ait donné de l’affection, est partie, « partie au Ciel ». C’est là, en effet qu’il l’imagine quelquefois. Félix a emmené un bébé d’un an laissé par une mère trop épuisée, trop violentée pour avoir la force de vivre encore. Et Félix, sans connaissance, avec le peu d’argent trouvé dans l’armoire de la maison du bébé où il était, aboutit ici à Buenos Aires, avec cet enfant dans les bras. Ils se sont mutuellement pris d’affection et Félix en prend soin comme un père ou un grand frère. Émouvant.

Maria Victoria Menis, une Argentine, a réalisé ce film, « El Cielito » sorti en 2004. Un film rare, modeste mais de qualité, original.

Félix se fera attaquer, dépouiller du peu d’argent qu’il avait. Condamné à la rue, son bébé toujours dans les bras, il sera la proie d’un petit délinquant et tombera mort à sa place, d’une balle destinée au jeune tueur !

Que deviendra le bébé confié à la sœur de ce dernier ?

…………………………………………….

L’autre jour dans une des belles rues de Bs. As., j’ai rencontré un autre Félix. Vers 18h, la soirée était douce, la rue animée, de nombreux touristes admiraient les vitrines parfois luxueuses, d’autres consommaient dans ces cafés qui à Buenos Aires sont souvent vastes, bien décorés, élégants. Lui, ce Félix-là, fouillait les gros  sacs de poubelles, les vidait, à la recherche de ce qu’il pourrait bien se mettre sous la dent ou aller revendre ! Il devait avoir à peine 20 ans. Personne ne faisait attention à lui et lui-même se concentrait sur ces sacs où le hasard lui ferait découvrir peut-être quelque immondice-trésor !

Quel sentiment éprouve-t-il devant cette prospérité satisfaite qui le nargue ? Colère, jalousie, interrogation sur son sort, détermination à en sortir, à tout prix, par tous les moyens ? Je ne saurai jamais . Mais je sais, oui, je sais que chez ses misérables fouilleurs de nos déchets nauséabonds, dominent la honte et l’humiliation et que la  violence délinquante, fille de cette misère qui la déchaîne quelquefois, n’est le fait que d’une petite minorité. Ils sont des centaines de milliers de Félix de tous âges dans les bidonvilles qui forment la grande Buenos Aires, les « vilas miserias » que les Brésiliens appellent les « favelas » et les Indiens les « slums ». Comment les nomment-on en Indonésie, aux Philippines, en Malaisie, au Pérou, au Nigeria et ailleurs ? Personne n’a encore établi ni publié le « vocabulaire » des lieux de l’enfermement urbain des centaines millions de Félix, de déshérités  de notre monde du XXI° siècle.

Je suis seul aujourd’hui, il est vrai et si je m’amuse, je peux, en effet, m’interroger sur l’étrangeté de cette situation de solitude. Mais pour moi ce n’est qu’un jeu.

Mercredi Renée et notre amie seront rentrées de leur petit voyage aux chutes d’Iguazu, le frigo est plein, l’appartement simple, un peu triste par manque de soleil, est assez confortable.  Internet et téléphone. Je me suis déjà familiarisé avec cette ville et sais en lire les plans divers pour ne pas m’y perdre.

L’avenue du 9Juillet où nous habitons est la plus majestueuse de Buenos Aires et tout à l’heure, j’irai à pied, à travers les beaux quartiers assister à un concert en plein air, profiter ainsi pour la deuxième fois, du 9° festival de jazz organisé en décembre par la ville de Buenos Aires.

Solitude de Félix.

Solitude d’un temps du voyageur européen.

Un même mot. Deux réalités sans aucune commune mesure.

H. D. Buenos Aires. 7 décembre 2009.

P.S. Demain 8 décembre, fête de l’Immaculée Conception. En Argentine, nation catholique, c’est férié m’a dit le plombier venu changer le pommeau de la douche.

 

 

 

 

 
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S
<br /> émouvant récit, qui me rappelle mon voyage en Egypte. On se faisait assaillir par une bande de petits mendiants qui criaient "Bernadette Chirac" pour nous attendrir! Les rues adjacentes à l'artère<br /> principale d'Assouan (lieu de prédilection pour touriste acheteurs de bijoux en or)y déversaient leurs misères!<br /> <br /> <br />
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H
<br /> Merci de ce commentaire<br /> <br /> <br />