Certes il a les maladresses liées à sa jeunesse et son passage chez les banquiers d’affaires où la recherche du maximum d’argent est la doxa dominante, l’a influencé ! Cela dit lorsque Macron déclare qu’il souhaiterait que beaucoup de jeunes Français ambitionnent de devenir milliardaires, derrière cette maladresse provocatrice, il dit quelque chose de vrai : On a besoin de jeunes qui aient l’esprit d’entreprise, qui n’hésitent pas à prendre des risques et se lancer dans les affaires industrielles, commerciales et de service ! C’est bien préférable que des jeunes de 25 / 30 ans dont la seule ambition serait d’être fonctionnaire pour jouir de la stabilité de l’emploi, des 35 heures et de la retraite à 60 ans !
Seulement, monsieur Macron, vos années chez Rothschild n’auraient pas dû occulter celles que vous avez passées auprès du grand Paul Ricœur et votre engagement à Esprit la revue fondée par celui qui, comme vous, portait ce beau prénom, Emmanuel Mounier. Audace, esprit d’entreprise, prise de risque, d’accord mais « devenir milliardaire » est une expression malheureuse de votre part qui dénote une infidélité à vos maîtres en philosophie !
Macron a étudié et pratiqué l’économie et sait très bien que la question n’est pas de sauvegarder ou créer des emplois mais plutôt de produire des richesses, des biens et des services compétitifs qu’on peut vendre. Et plus on vend, plus on a besoin de produire et donc plus on a besoin de « producteurs », c’est-à-dire d’employer des salariés qui vont concevoir, fabriquer, produire ce qu’on peut vendre ! Les emplois sont alors le résultat d’une production compétitive. « La France n’a pas réformé ces dix dernières années, explique M. Macron. Nos entreprises perdent des parts de marché » C’est vrai et c’est pourquoi on n’a pas embauché et souvent débauché ! Comment voudriez-vous que j’embauche si je ne peux pas vendre ma production ? Ce serait la meilleure façon de conduire à la fermeture et au licenciement de…tout le monde !
Et Macron a raison également d’oser dire : « le fait que la France soit l’un des pays qui protège le plus ses travailleurs est l’une des explications de son taux de chômage à 10 % ».
Là aussi il provoque et je ne suis pas sûr que de la part d’un ministre « socialiste » ce soit astucieux. Mais ce qu’il dit est vrai. Depuis près de 40 ans, malgré les déclarations hypocrites de dirigeants politiques il n’y a jamais eu véritablement de « guerre contre le chômage », bien au contraire ! La société française emmenée par ses prétendues « élites », les politiciens ou les fameux « partenaires sociaux », a choisi le chômage massif, particulièrement des jeunes et des plus faibles, pour permettre la hausse du niveau de vie et la tranquillité des salariés « protégés ». Pourquoi a-t-on choisi ce chômage massif ? Une des raisons se lit dans l’examen des catégories de salariés représentés par les « partenaires sociaux ». Les syndicats dits représentatifs rassemblent environ 5 % à 7% des salariés. Et qui sont ces salariés syndiqués ? Les fonctionnaires des trois fonctions publiques, les ouvriers cadres et employés des grandes entreprises publiques comme EDF ou SNCF ou encore des grands groupes puissants où les succès à l’exportation et l’expansion autorisent des conventions collectives protectrices et de meilleurs salaires. « Les partenaires sociaux » qui avec l’État décident pour TOUS les salariés, actuels ou futurs, en fait ne représentent presque que les salariés protégés ! Ils ont logiquement défendu d’abord les intérêts de ceux-là, leurs mandants, quitte à sacrifier hypocritement les autres…sans le dire !
Alors pendant 40 ans, on a favorisé les « protégés », les gens en place au détriment de tous les autres. Augmentations de salaires, préretraites avantageuses, diminution de la durée du travail et augmentation des congés de toutes sortes, stages de formation continue….Les milliers de ceux qui frappaient à la porte des entreprises pour trouver du travail ne rencontraient que portes fermées et bientôt des entreprises plombées par les « acquis » des « protégés », qui ne cessaient de perdre des parts de marché. Les trois fonctions publiques ne cessaient de recruter. C’était nécessaire pour des services publics de qualité, peut-être. Mais le moment est vite venu où le statut hyper protecteur des fonctionnaires, a alimenté les diverses bureaucraties parasitaires tandis que l’État et les collectivités publiques ne cessaient de s’endetter !
Attention ! Écrire cela n’implique pas un quelconque hymne à la croissance matérielle ni au développement du capitalisme sauvage !
« Produire à prix compétitifs » ce peut être produire surtout des services qui créent du lien et du bien-être et pas seulement des objets de surconsommation !
Trouver un nouveau paradigme d’une croissance liée à la qualité de la vie plus qu’à la quantité n’empêchera pas de devoir produire à prix compétitifs face à la concurrence !
Attention ! Vouloir des entreprises prospères et souhaiter que la super protection de certains ne grève pas la rentabilité d’une entreprise, ne signifie en rien qu’il faudrait tolérer les privilèges scandaleux, les salaires mirobolants des dirigeants qui se prennent pour des surhommes et les bureaucraties parasitaires. Ni accepter, au nom du libéralisme, que les fonds de pension et divers fonds financiers jouent avec les entreprises dans la seule recherche de la valeur maximum des actions !
Attention ! Cela ne veut surtout pas dire qu’il faut oublier que chaque travailleur quel qu’il soit a droit à l’estime de soi, à ne jamais subir le moindre mépris et à une rémunération correcte, à des conditions de travail humaines !
Infirmières et infirmiers, aides-soignants, secrétaires, téléphonistes, médecins de toutes spécialités, dentistes, professeurs, surveillants, personnels de service, psychologues, magasiniers, caissières, démarcheurs, conseillers commerciaux, ingénieurs et techniciens de production et de recherche, laborantins, comptables et aides-comptables, ouvriers qualifiés, informaticiens, formateurs, personnels de service, il y a des millions de gens de toutes qualifications à faire travailler. Il y a du travail et on ne manquera jamais de travail. Dans une société de « services » nous aurons toujours besoin de « nous rendre des services les uns aux autres » et il n’y a qu’à songer aux besoins immenses des personnes âgées, des personnes seules, des mères de famille seules avec enfants ! Il n’y a qu’à penser à la santé, l’éducation, la formation, le transport, l’isolation, le recyclage, les divers artisanats, les services de réparation et cette énumération n’aurait quasiment pas de fin ! Sans parler aussi des milliers de chercheurs qui seraient utiles. Et société de services ne veut pas dire non plus qu’on n’a plus besoin d’une industrie innovante et capable de conquérir des parts de marché ! L’entreprise Samsung à elle seule a embauché …40 000 chercheurs, trois fois le nombre de chercheurs du CNRS ! Alors que manque-t-il ? Non pas du travail, mais des ressources régulières et mieux partagées, et non plus gaspillées comme c’est souvent le cas, pour payer les salariés et leur assurer une rémunération et un statut social digne ! Et des salariés qui permettent à l’entreprise de demeurer compétitive sur son marché de façon à dégager justement ces ressources !
Allez monsieur Marcon ! Courage ! Courage ! Vous avez des montagnes à soulever. Je ne suis pas sûr que ceux qui vous ont nommé aient l’énergie ni la volonté de vous y aider !
Henricles 23 avril 2015
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